Au cœur du Morvan, producteurs et saisonniers façonnent pendant huit ans les sapins qui illumineront nos fêtes en quelques jours seulement.

Chaque hiver, on installe notre sapin dans le salon comme un petit rituel. On le décore, on l’arrose parfois, on admire son parfum. Mais on oublie souvent que, derrière ce symbole des fêtes, il y a des années de travail, de patience et de gestes précis. Dans le Morvan, l’une des capitales françaises du sapin de Noël, cette réalité prend une dimension particulière. Là-bas, produire un sapin n’a rien d’un petit boulot de saison : c’est un engagement à l’année, presque une promesse faite à la nature.
Dans cette région de Bourgogne où les forêts semblent respirer à leur rythme, la culture du sapin est un pilier économique… mais aussi une affaire de transmission. Le Morvan fait partie des trois grandes zones productrices françaises, couvrant environ 30 % de la production nationale selon les professionnels du secteur.
Aux établissements Marchand, à Gouloux, l’activité remonte aux années 1940.
Aujourd’hui, c’est Pierre Marchand, 38 ans, qui perpétue ce savoir-faire familial.
« Les sapins qu’on conditionne aujourd’hui, il a fallu huit ans pour les faire pousser. Et ça ne pousse pas tout seul. » – Pierre Marchand
Cette phrase, Pierre la répète autant pour rappeler la patience nécessaire que pour défendre un métier trop souvent résumé à la seule période de Noël.
Chaque année, l’exploitation produit 20 000 sapins, vendus en majorité à des grossistes, et emploie une quarantaine de saisonniers au pic d’activité. Un ancrage local fort, qui fait vivre la commune autant qu’il embellit nos fêtes.

Derrière un sapin bien formé, il y a un travail d’orfèvre.
On commence par la terre : analyse du sol, préparation des parcelles, enrichissement naturel. Puis viennent les jeunes plants, qui mettront des années à devenir l’arbre que l’on choisira au marché.
À partir de la troisième année, chaque sapin fait l’objet d’une attention particulière.
« On taille chaque sapin deux fois par an. On tourne autour, on le forme, on le sculpte. L’idée, c’est qu’il soit beau dans le salon. » – Pierre Marchand
Et cette exigence se répète des milliers de fois sur des parcelles entières.
Quand l’automne arrive, le rythme s’accélère brusquement :
coupe, palettes, stockage, transport…
Un marathon de quelques semaines pour valoriser huit années de patience.
Pour tenir les délais, l’entreprise peut compter sur environ 40 saisonniers, dont certains travaillent chaque année au même poste. Parmi eux, Théo Mangematin, embauché depuis trois ans. À la fois responsable de la production des pieds de sapins et présent sur les coupes, il connaît bien les exigences du métier.
« C’est un boulot sympa mais physique », confie Théo. « On travaille dehors, on bouge beaucoup… mais on sait qu’on prépare quelque chose qui fera plaisir à des milliers de familles. »
C’est aussi un métier sous tension : la fenêtre commerciale est très courte.
Un retard, un problème météo, un souci de logistique… et toute une saison peut vaciller.
« Les enjeux sont énormes sur une période très courte. On ne peut pas se manquer. » – Pierre Marchand
Les producteurs innovent aussi.
De plus en plus, les sapins sont vendus “floqués”, une technique qui consiste à les recouvrir de neige décorative blanche, rouge ou bleue. La matière utilisée, à base de coton et de jeans recyclés, permet aussi au sapin de se conserver plus longtemps.
Et pour éviter que l’arbre ne sèche avant les fêtes, les producteurs dont Pierre Marchand, également secrétaire de l’Association française du sapin de Noël naturel, recommandent :
👉 d’acheter son sapin à partir du 1er décembre,
👉 et de le conserver à l’abri des sources de chaleur.
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En voyant un sapin éclairer un salon, on imagine rarement les années de travail qui ont précédé ce moment.
On ne voit pas les saisons qui passent, les tailles répétées, les mains qui sculptent, les bottes dans la terre humide, la logistique minutieuse, l’angoisse du timing… et la fierté, surtout.
Dans le Morvan, produire un sapin de Noël, c’est participer à un rituel national.
C’est offrir un peu de beauté aux fêtes de milliers de familles.
C’est un métier humble, exigeant, ancré dans le territoire, où la nature impose sa cadence.
Et cette année, si en décorant votre sapin vous pensez à Pierre, Théo, et à tous ceux qui veillent sur ces arbres depuis huit ans…
alors vous verrez votre sapin différemment. Peut-être même un peu plus fort.
